Pièce de théâtre pour six comédiens - 90 minutes
Dans l'intimité du pouvoir, à cheval entre le XVIIIe et le XXIe siècle, entre la France et la Russie, s'affrontent deux idéologies politiques et sociales, autour d'une « affaire » macabre.
Grégoire Orlov, ancien général des armées de l'impératrice Catherine II, a fuit la Russie, emportant avec lui des documents confidentiels. Le bras droit de l'impératrice, Grégoire Potemkine, organise son arrestation…qui se termine en assassinat…relayé par la presse du monde entier.
Ce scandale n'inquiète pas pour autant les proches du pouvoir, car il y a plus grave…le tableau préféré de Catherine vient d'être volé dans l'Abreuvoir, la salle de jeu de la souveraine…
Ainsi nait l'Affaire Orlov…
A l'origine de cette pièce, il y a « l'affaire Khashoggi ».
Le 2 octobre 2018, un journaliste d'origine saoudienne, Jamal Khashoggi est assassiné au Consulat d'Arabie Saoudite en Turquie.
Immédiatement les démocraties s'insurgent, parlent de pratique barbare d'un autre temps et demandent des comptes au prince saoudien, Mohammed Ben Salmane, supposé à l'origine de l'exécution.
Mais très vite le ton se calme, car l'Arabie Saoudite a des contrats économiques avec plusieurs autres pays, notamment les Etats-Unis, mais aussi l'Allemagne et la France qui ont signé des accords d'armement. Elles rechignent à s'opposer frontalement à leur généreux acheteur, alors que les preuves s'accumulent contre le prince saoudien.
Ce qui découle de cette affaire, et qui a été pour moi véritablement marquant, c'est que la loi de l'économie a pris le pas sur les libertés et les droits de l'Homme, pourtant apparemment si chères aux démocraties.
L'Affaire Orlov se veut être une traduction de cette affaire dans la Russie de Catherine II, à la fin du XVIIIe siècle.
C'est une pièce sur la fabrication et la pratique du pouvoir, elle montre les coulisses de cet art particulier. Il me semble alors évident de montrer les coulisses du théâtre qui essaient de l'illustrer.
Il n'y aura pas d'illusion théâtrale.
Nul besoin de faire croire au spectateur à une représentation du réel. Ici, tout est fabrication, illusion, subterfuge, artefact pour parler d'un monde qui use aussi de tout cela pour arriver à ses fins.
Et quoi de plus flagrant que l'espace d'une salle de jeu d'argent pour prolonger cette fabrication du pouvoir où les joueurs deviennent des animaux politiques venus assouvir leur soif d'argent dans une salle spécialement conçue pour eux, L'Abreuvoir. L'argent qui réunit, qui rassemble et met de côté – l'espace d'une partie – les différences des joueurs.
Cet espace fait de bric et de broc, en bois recyclé, sale et poussiéreux se trouve être l'endroit le plus sûr du royaume où l'on conserve le tableau préféré de l'impératrice, L'Avarice de Dürer…œuvre qui avertit de l'inutilité de la fortune et du caractère éphémère de la vie.
...jusqu'au jour où le tableau est volé.
L'intérieur de cette salle de jeu, espace frontière entre le privé et le public, n'est pas directement visible par le spectateur. Les scènes qui s'y jouent sont montrées à l'aide de la vidéo en direct et projetées sur écran.
A cette utilisation de la vidéo, s'ajoute celle préenregistrée montrant des scènes typiques d'un journal télévisé en France. C'est par ce média qu'est véhiculé l'espace public du pouvoir, où on apprend l'assassinat et la réaction des démocraties à cet évènement.
L'espace du plateau est, quant à lui, le lieu – non pas de l'information médiatique, ceci est la fonction de la vidéo – mais le lieu d'un questionnement du pouvoir et de sa pratique à travers deux modes de pensée, celle démocratique et celle autoritaire (voir totalitaire) qui s'opposent et s'affrontent.
A travers un journal télévisé, Victoire informe les spectateurs des dernières nouvelles concernant Grégoire Orlov, l'ancien bras droit de Catherine II que cette dernière aurait fait assassiner.
Comédienne : Marianne Feneyrol